Responsable du service urbanisme commercial à la Chambre de Commerce et d’Industrie (CCI) de Lyon, Gaëlle Bonnefoy-Cudraz conseille, avec l’aide de son équipe, porteurs de projets, commerçants et collectivités en matière d’implantation et de développement commercial.
Nous l’avons rencontrée lors du dernier Forum Franchise Lyon afin d’éclairer les candidats entrepreneurs dans la recherche du futur emplacement de leur activité.
Pourquoi l’emplacement est-il fondamental dans la réussite d’un commerce ?
A la différence des activités de services ou industrielles, le commerce est une activité dans lequel l’emplacement joue un rôle crucial pour attirer les clients.
Maîtriser son concept commercial permet de définir le type de lieu de son implantation correspondant à son projet entrepreneurial. Détenir un joyau en termes de concept ou s’implanter dans une rue commerçante n’est jamais un gage suffisant de réussite.
Le porteur d’un projet n’a pas le droit à l’erreur : il s’engage sur une durée minimale de trois ans à travers un bail, et malgré toute la qualité d’une communication locale, le manque d’attractivité du local commercial sera difficile à compenser en cas de mauvais choix.
Toute recherche se réalise en deux temps : d’abord une présélection de 4 ou 5 emplacements, puis une réflexion approfondie pour confirmer le bien-fondé ou non de chacun de ces emplacements. Dans ce cadre, il ne faut pas hésiter à passer du temps sur le terrain pour observer comment vit l’emplacement, et le faire à différents moments de la journée et de la semaine.
Comment sont classés les emplacements ?
En fonction de leur fréquentation et plus globalement de leur commercialité, ce qui détermine le coût de la valeur locative. Selon son budget d’investissement et son business plan, le porteur de projet devra réaliser des arbitrages pour évaluer la rentabilité de sa future entreprise.
Toutes les activités n’ont pas besoin d’emplacement numéro 1 – les plus chers -, et peuvent parfois s’orienter vers des rues transversales ou des pôles commerciaux moins fréquentés.
Comment un porteur de projet doit-il procéder dans sa recherche de local ?
D’abord, tout dépend du secteur d’activité et de son concept.
Quelle est la seconde étape ?
Dans le cadre d’un partenariat entre acteurs publics et privés locaux[1] visant à une gouvernance de la stratégie commerciale de notre territoire, de nombreuses actions sont menées pour favoriser le dynamisme économique dans l’agglomération lyonnaise, comme la détection de nouveaux concepts, ou la réalisation de grandes enquêtes régulières sur la consommation des ménages en région lyonnaise[2].
17 sites prioritaires de centre-ville ont ainsi été définis, ce qui offre autant de lieux d’implantations potentiels dont nous possédons une connaissance approfondie à travers des études et des remontées du terrain, notamment effectuées par des managers de centre-ville ou d’autres référents sur ces zones.
Ce dispositif permet, par exemple, de détecter un local vacant ou en passe de l’être, de le mettre en relation avec un porteur de projet proposant un concept correspondant à un besoin des consommateurs identifié et non comblé pour ce local. Ceci, afin de compléter la composition commerciale du pôle commercial où se trouve le local et conforter son attractivité.
Quelles sont les contraintes à respecter ?
C’est la dernière étape dans la recherche du local : vérifier qu’il n’y a pas d’incompatibilité avec les différentes réglementations pour implanter le concept.
Par exemple, la possibilité d’extraction dans le cas de la restauration, ou l’autorisation du règlement de copropriété limitée à certaines activités. Certaines réglementations sont liées au Plan Local d’Urbanisme. Il faut être notamment vigilant sur le plafond de surface autorisé, sur l’interdiction du changement d’une activité commerciale en logement et sur la compatibilité de l’emplacement pressenti avec la destination commerciale des lieux.
Ainsi, les activités de services, comme l’assurance et l’intérim, ne sont parfois pas autorisées dans les linéaires commerciaux stricts. Il faut aussi contrôler, en cas de besoin, que l’on puisse utiliser des espaces extérieurs, comme pour la vente de piscines, ou réaliser des extensions, ce qui est fixé par le coefficient d’emprise au sol.
D’autre part, dans les zones périurbaines, en dehors de pôles spécifiquement dédiées aux commerces telles que Porte des Alpes ou Ecully Pérollier , il est souvent interdit de faire du commerce.
La volonté politique est de concentrer le commerce en dédiant des zones à cette activité, avant d’éviter un développement déséquilibré ou trop volumineux par endroits, mais aussi de favoriser une autosuffisance des bassins de vie dans une logique de multipolarité et de rejoindre certaines exigences du développement durable.
Une fois l’emplacement déterminé, quels sont les actions à entreprendre ?
En premier lieu, étudier la concurrence, qu’elle soit frontale ou complémentaire, en termes d’ancienneté, de santé financière, de notoriété… Et connaître le fonctionnement du pôle commercial et de sa zone de chalandise, toujours par rapport aux besoins de son concept : flux piéton ou routier, accessibilité par les transports en commun, dynamisme et attractivité du quartier, projets urbains en cours ou à venir, mais aussi adaptabilité des locaux en termes de surface, de vitrine…
Par exemple, la clientèle du pôle commercial, est-elle captive ou connaît-elle une forte évasion ? Si la zone de chalandise est courte, une emprise plus élevée sur les habitants sera nécessaire, et si le potentiel commercial est restreint, une moindre présence de la concurrence s’imposera. Cette analyse globale permettra au porteur de projet de définir son « approche du marché ».
Il sera alors temps de regarder les conditions du bail…
Le porteur de projet peut alors s’adresser à des agents immobiliers. Nous pouvons lui donner une idée d’évaluation des valeurs locatives à partir de transactions récentes réalisées sur le quartier.
Les points à inspecter restent nombreux : activités autorisées dans le bail, charges supportées par le locataire et le bailleur, indemnités éventuelles de déspécialisation, règlement de copropriété, estimation du coût des travaux, longueur de vitrine, configuration du local, surface de stockage… Il faudra aussi se renseigner sur l’environnement du local.
Par exemple, s’il y a des travaux prévus dans la rue ou le quartier. Dans sa décision finale, le porteur de projet pourra alors faire la balance entre le coût de l’emplacement et les bénéfices financiers engendrés par son activité commerciale. Il ne devra pas simplement choisir un local correspondant à sa psychologie du commerce, mais trouver l’adéquation entre son projet, le marché, le lieu et le prix de l’emplacement.
Propos recueillis par François Simoneschi
[1] Dont le Grand Lyon et la Chambre de Commerce et d’Industrie
[2] 6200 foyers sont concernés par la 9e enquête consommateurs de la région lyonnaise et beaujolaise, réalisée de septembre à décembre 2011 et publiée début novembre 2012 sur www.consorhone.fr