Il faut définir le modèle de l’unité franchisé (taille, type d’emplacement, etc.) et parfois procéder à des ajustements par rapport aux unités-pilotes. Voire à une refonte du concept architectural.
Le modèle de l’unité-pilote du franchiseur n’est pas forcément celui de l’unité du franchisé.
« L’unité-pilote peut être adossée à une autre activité ou posséder certains éléments qui ne seront pas utiles au modèle final. A partir des unités-pilotes du franchiseur, on réalise une synthèse en recherchant le meilleur équilibre possible pour le franchisé. Ce dernier ne s’intéresse pas au compte d’exploitation du franchiseur, mais au sien ! Il doit pouvoir bénéficier d’une activité rentable. Plus le concept est rémunérateur, plus les candidats entrepreneurs seront intéressés », explique Jean-Paul Zeitline, fondateur du cabinet Progressium.
Les bonnes recettes du modèle existant sont longuement analysées.
« Si le concept n’est pas suffisamment abouti, il faut le retravailler pour lui faire gagner en performance économique dans les sites détenus en propres par le candidat franchiseur. Cela peut concerner des éléments du marketing, la refonte du logo originel et de la base line, la recomposition de l’offre de produits et services. Cela peut aller jusqu’à la refonte de l’architecture, voire une version 2 du concept. Le bon sens voudrait alors que l’on attende la fin de la saison suivante avant de tirer des enseignements sur les modifications apportées. L’ADN franchiseur, c’est de tester et d’innover, d’être créatif », souligne Franck Berthouloux, consultant au sein du cabinet Adventi Franchise.
La refonte du concept architectural s’est avérée impérative pour une enseigne d’achat-vente d’or.
« Dans notre métier émergent, seules les entreprises les plus solides resteront. Il nous a fallu relooker le design de nos agences en faisant appel à une agence spécialisée. En travaillant sur la sécurité du point de vente et le confort des clients, à travers un espace confidentiel fermé, nous nous sommes positionnés comme un leader sur notre marché, tout en marquant le départ d’une nouvelle ère l’entreprise-franchiseur. Ce qui a aussi pour effet de rassurer les candidats entrepreneurs », déclare Bernard Corbi, directeur réseau franchise de La Compagnie Nationale de l’Or.
Il est parfois tout simplement nécessaire de créer une unité-pilote, même quand le réseau compte déjà plusieurs points de vente.
« Nous étions développé sur le grand est de la France sans posséder un modèle-type bien déterminé, et en fonctionnant à partir du bouche à oreille. Nous avons donc testé un modèle sur une zone géographique toute nouvelle. Cette construction de l’unité-pilote nous a permis de mieux déterminer notre technique de prospection des prescripteurs… et même, de toucher de nouveaux types de prescripteurs. Ce qui, au final, a sensiblement amélioré la performance de nos propres agences », se souvient Frédy Louis, dirigeant-fondateur d’Idésia.
Il est nécessaire de réfléchir à l’organisation du franchiseur : développement, logistique, centrale d’achat ou pas… Et définir les règles du jeu dans le réseau, comme les conditions d’attribution des territoires aux franchisés.
Un projet de développement en franchise, comme tout projet d’entreprise, doit s’inscrire dans le temps.
« Il faut notamment prévoir le déploiement du réseau à 5 ans. A partir de 20 franchisés, la structure de la tête de réseau devra forcément évoluer, en termes de compétences et de composition. De même, des éléments de gestion du réseau s’adapteront à sa taille, comme la création d’un système d’information ou d’une logistique propre à cette activité. Si ce changement n’a pas été anticipé dans la qualité de services aux franchisés et dans la rémunération du franchiseur à travers les redevances, le réseau peut brutalement stopper sa progression, voire disparaître. Il faut être capable de se projeter dans le rapport entre recettes et dépenses du système de franchise», constate Jean-Paul Zeitline.
Le franchiseur est un prestataire de services vis-à-vis des franchisés.
« Il est possible d’externaliser une partie des services proposés à des sociétés spécialisées. D’autre part, certains investissements peuvent être anticipés plus tôt dans le développement, comme une plate-forme logistique pour améliorer les approvisionnements des franchisés. Ils peuvent s’expliquer lors d’une demande de financement à un établissement bancaire, en avançant leur amortissement par le développement du réseau et une meilleure satisfaction des premiers franchisés.
La franchise, comme toute création d’entreprise, reste une prise de risques. Enfin, on constate que les nouveaux franchiseurs ont tendance à travailler avec leurs connaissances sur de nouvelles compétences, comme l’aménagement d’un point de vente. Or, il faut sortir de l’affectif et travailler sur des périmètres plus larges que le cercle familial ou amical, voire le département ou la région. En s’entourant de spécialistes reconnus au niveau national, voire international, le concept change généralement de dimension et acquiert une identité difficilement copiable », relève Franck Berthouloux
Cet appel à des sociétés spécialisées doit préserver le libre arbitre du client franchiseur.
« Notre consultant en management des réseaux a formulé des conseils, mais l’arbitrage sur les choix définitifs nous a totalement appartenu. Le franchiseur doit s’approprier son projet de franchise, comme il doit impliquer ses salariés dans cette transition, par exemple à travers la rédaction du manuel opératoire. Cette communication en interne rassure les employés. De plus, former des gens de l’extérieur pour faire le même métier donne une autre dimension à votre travail quotidien, le valorise, car l’entreprise apparaît clairement comme novatrice parmi les acteurs de son secteur », remarque Antoine Pereira Da Vale, chargé de mission franchise chez Yprema.
Ce travail sur l’organisation du franchiseur s’accompagne d’une réflexion sur les règles de fonctionnement au sein du réseau de franchise, comme les conditions d’attribution des territoires aux franchisés, qui seront traduites dans le contrat de franchise (cf. leçon 9).
François Simoneschi, rédacteur en chef de La Référence Franchise
« En franchise, on n’a pas le droit au rodage »
« Entre l’étude de faisabilité d’un projet en franchise et le lancement du développement, il y a une étape intermédiaire d’ingénierie, pour modéliser le développement au niveau économique. Il faut regarder le projet sur les cinq premières années pour définir les caractéristiques de l’unité franchisée, réfléchir à l’organisation du franchiseur et définir les règles de jeu dans le réseau, comme les conditions d’attribution des territoires aux franchisés, en fonction des spécificités du concept. On pourra alors commencer la rédaction du manuel opératoire. Le contrat sera réalisé en dernier. Il n’est pas la base du développement, mais l’aboutissement de la réflexion sur le déploiement du réseau en franchise.
Il ne faut en aucun cas se lancer en franchise sans avoir préparé l’ensemble du projet, avec tous les outils nécessaires au bon fonctionnement du système. Les premiers franchisés paient le droit d’entrée et les redevances, comme les suivants. En franchise, on ne peut pas avancer en marchant. On n’a pas le droit au rodage, qui doit être effectué sur les unités-pilotes du franchiseur et à travers toute cette partie de réflexion. De plus, durant la première année de recrutement de franchisés, il ne faut commettre aucune erreur.»