Un candidat entrepreneur doit explorer toutes les pistes d’évolution dans sa carrière professionnelle. Nous avons cherché à détailler les différences entre créer son entreprise en isolé et le faire en franchise.
Mise à disposition d’une marque, transmission d’un savoir-faire différencié, et assistance permanente du franchiseur : tels sont les 3 éléments dont bénéficie un entrepreneur franchisé, en contrepartie d’une application à la lettre du concept de l’enseigne et d’une rémunération versée au franchisé pour ses différents services.
Si le candidat préfère se lancer dans la création d’entreprise en solo, il met en œuvre sa propre idée de business, en pouvant notamment utiliser son expertise dans un domaine d’activité. Il peut également bénéficier de l’accompagnement d’une institution telle que Réseau Entreprendre, dont 81% des entrepreneurs suivis sont encore en activité 5 ans après le démarrage de leur entreprise.
Entretien avec Bénigne du Parc, directeur de Réseau Entreprendre Hainaut.
La Référence Franchise : Pour démarrer son entreprise en franchise, le candidat entrepreneur bénéficie d’une idée de business au succès éprouvé[1] et codifiée dans un manuel opératoire. Ce qui lui fait généralement gagner 1 à 2 ans pour être opérationnel et efficace sur le marché. Qu’en est-il lorsqu’il se lance en solo ?
Bénigne du Parc : Il pourra développer sa propre idée d’affaire, sans forcément qu’elle soit originale. Par exemple, en adoptant un positionnement différent sur le marché – en termes de prix, offres, services… -, qu’il détermine souvent petit à petit en montant son projet. Il existe en général deux typologies de candidats entrepreneur en solo.
Premier cas, le candidat entrepreneur qui possède un produit ou un service qu’il trouve génial, tel qu’un brevet déposé, un service Web ou une idée découverte à l’étranger, et qui n’existe pas sur le marché français. Il convaincu que ce produit ou ce service répond à une demande de clients, particuliers ou entreprises. Il devra ainsi tout construire pour donner vie commerciale à son produit ou service : prix, gammes, force commerciale, recrutement…
Il cherchera donc à évangéliser le marché de son secteur, en passant du statut de technicien à celui de chef d’entreprise. Ce qui exige d’autres compétences.
Second cas, le candidat qui possède une expertise dans un domaine - nettoyage industriel, menuiserie, etc. - et qui exprime une volonté d’indépendance, de piloter son quotidien. Par exemple, il est commercial dans la vente de vêtements de travail et estime qu’il pourrait exercer la même activité en solo puisqu’il connaît les clients, les fournisseurs... Cela exige une personnalité de chef d’entreprise. Il faudra toutefois veiller aux clauses de non-concurrence, puisqu’il s’agit du même créneau que l’activité exercée auparavant.
LRF : Comment le candidat entrepreneur peut-il déterminer que son idée de business est viable ?
BDP : Il doit la confronter à des personnes compétentes sur le sujet, des chefs d’entreprise ou des experts-comptables, ainsi qu’à son propre réseau de connaissances, même si celles-ci ne sont pas issues de la même activité. Il faut susciter des « effets miroir » sur son projet et ne pas craindre de se faire voler l’idée.
Cette confrontation permet de gagner des mois, voire des années, dans la mise au point de son affaire. Il faut juste prendre un minimum de précautions avec les personnes connaissant le monde de l’entreprise, par exemple en faisant signer des clauses de confidentialité. Mais sans verser dans la paranoïa.
Le temps pour formaliser une idée d’une entreprise est variable. Il dépend à la fois de la complexité du modèle économique et de la capacité du candidat à adopter la stature de chef d’entreprise. Cela prend en général un peu moins d’un an.
LRF : En franchise, le candidat entrepreneur bénéficie d’une formation initiale et d’une marque, qui lui permette d’être immédiatement reconnu comme un professionnel avéré et de générer immédiatement du trafic de clientèle. Quand il s’agit réellement d’une marque, bien entendu. Qu’en est-il pour le candidat entrepreneur en solo ?
BDP : La marque n’est pas essentielle dans la création en solo. Elle vient dans un second temps, et appartiendra au chef d’entreprise. Il faut d’abord créer le projet avant la marque ! L’entrepreneur solo pourra mettre en place et faire évoluer son projet, sans devoir s’inscrire dans le cadre strict du concept d’un franchiseur.
LRF : En franchise, le candidat entrepreneur bénéficie d’une assistance permanente de la part de son franchiseur, en particulier à travers une structure opérationnelle salariée spécialisée par domaines (juridique, marketing, etc.). Quel accompagnement propose Réseau Entreprendre à des créateurs d’entreprise en isolé ?
BDP : En amont de la création d’entreprise, des rendez-vous avec 5 chefs d’entreprise sont organisés pour permettre au candidat entrepreneur de formaliser son projet, à travers « l’effet miroir ». L’objectif est de l’amener à réfléchir à différentes options, tout en le laissant maître de son projet.
Une fois l’idée et le modèle économique validés, un entrepreneur expérimenté, un « parrain », prend le relais au rythme d’un rendez-vous par mois durant deux années, afin d’aider le candidat à trouver sa dimension de chef d’entreprise. Ce dernier est mis en relation régulière avec d’autres créateurs de sa promotion, lors de « clubs » mensuels, afin de pouvoir comparer ses choix sur des problématiques communes, comme le recrutement, l’administratif, le commercial ou le social.
LRF : Intervenez-vous dans le montage financier du dossier ?
BDP : Nous pouvons déjà compléter l’analyse de l’expert-comptable. Nous accordons également un prêt d’honneur, variant entre 15 000 et 50 000 euros.
Le label « Réseau Entreprendre » permet d’être reconnu par les acteurs de la création d’entreprise locaux, et en particulier d’avoir une plus grande écoute de la part des établissements financiers au moment de l’obtention d’un prêt professionnel. Au niveau national, selon une enquête récente, 81% des entreprises labellisées « Réseau Entreprendre » existe encore cinq ans après leur création, alors qu’une sur deux disparaît dans la création d’entreprise en général.
LRF : Et pour la recherche du local ?
BDP : Réseau Entreprendre peut orienter le candidat entrepreneur vers des organismes avec des offres immobilières. Nous avons souvent le rôle d’une plate-forme d’informations, avec une véritable connaissance de notre territoire et des acteurs pouvant permettre au candidat d’accélérer son montage financier ou sa recherche de local, tout en le recommandant.
LRF : Un franchiseur a l’obligation d’accompagner ses franchisés tout au long d’un contrat, d’une durée généralement comprise entre 5 et 10 ans. Comment Réseau Entreprendre accompagne-t-il ses candidats entrepreneurs ?
BDP : Au terme du remboursement de leur prêt d’honneur, certains entrepreneurs adhèrent à Réseau Entreprendre. Nous travaillons aujourd’hui à un programme de croissance pour accompagner les entrepreneurs labellisés dans la montée en puissance de leur affaire après 2 ou 3 ans d’activité. Ce sera le cas dans le Nord-Pas-de-Calais en 2013.
LRF : En contrepartie des services rendus par son réseau, un franchisé doit rémunérer un franchiseur à travers un droit d’entrée, des royalties sur le chiffre d’affaires et une redevance publicité. Qu’en est-il pour un entrepreneur labellisé Réseau Entreprendre ?
BDP : Nous n’avons aucun rapport marchand avec les entrepreneurs labellisés, qu’on appelle les « lauréats ». L’appui qu’ils trouvent à Réseau Entreprendre est entièrement gratuit.
Cette gratuité est essentielle : elle nous permet de leur donner des conseils désintéressés. Nous sommes dans la bienveillance, mais jamais dans la complaisance : nous sommes exigeants, nous donnons le meilleur de nous-mêmes en demandant à nos entrepreneurs labellisés d’agir de même.
Au-delà du prêt d’honneur servant de levier dans l’emprunt bancaire comme apport personnel, nous apportons aussi de la confiance au candidat entrepreneur, un élément toujours primordial pour faire aboutir un projet.
LRF : Comment peut-on devenir entrepreneur labellisé par Réseau Entreprendre ?
BDP : Nous sommes ouverts à tous, avec certaines exigences. Par exemple nous accompagnons uniquement les entreprises à potentiel d’emploi, en imposant la création d’au moins 5 postes salariés sous 3 ans. La création doit se faire sur notre territoire du Hainaut[2]. Nous intégrons en moyenne un candidat sur 10.
Nous ne cherchons pas le projet parfait, mais avant tout des personnes qui ont la carrure, la foi et la fougue pour entreprendre, qui ont l’énergie, l’envie, la capacité d’adaptation et à s’entourer de personnes bienveillantes et positives...
Avec de telles qualités, il est toujours possible d’arriver avec un projet non abouti et de le retravailler. En revanche, même avec un excellent projet, on peut échouer, par manque de polyvalence ou incapacité à se remettre en cause.
Propos recueillis par François Simoneschi
[1] Depuis au moins deux ans, et de préférence, sur au moins deux unités-pilotes. Le candidat entrepreneur doit naturellement vérifier qu’il a affaire à un bon franchiseur.
[2] Valenciennes, Douai, Cambrai, Maubeuge