En septembre dernier, La Référence Franchise a assisté à une réunion d’information organisée par l’enseigne Bureau Vallée à son siège, situé aux Clayes-Sous-Bois (Yvelines).
Ce réseau utilise cette étape dans son parcours de sélection mutuelle depuis dix ans. Un premier contact avec de potentiels futurs franchisés que n’a jamais manqué le dirigeant-fondateur de Bureau Vallée, Bruno Peyroles. Reportage.
Un lundi de septembre 2012, 9 heures : l’enthousiasme au rendez-vous
Les Clayes-Sous-Bois, en grande banlieue parisienne. A l’occasion d’une réunion d’information organisée par Bureau Vallée[1], 14 candidats entrepreneurs, dont trois duos d’associés[2], vont venir découvrir concrètement le fonctionnement en franchise de ce réseau, au-delà des renseignements d’usage présents sur Internet et dont la diffusion est parfaitement contrôlée par tout franchiseur.
Ils arrivent au compte-gouttes. L’ambiance est conviviale. Dans une salle d’attente, assis sur des sièges en carton proposés dans les magasins de l’enseigne, ils s’étonnent joyeusement de la réelle solidité de ce matériel, en apparence de fortune. La création d’entreprise reste un parcours du combattant, mais autant le réaliser avec enthousiasme.
9 heures 15 : une illustration de la réussite en hors d’œuvre
Dans une vaste pièce du siège de l’enseigne, face à une assemblée studieuse à peine perturbée par l’entrée progressive des retardataires, la responsable du recrutement du réseau, Laurence Maguarian, commence cette longue journée d’échanges par un coup d’éclat : un reportage vidéo réalisé quelques jours auparavant par l’émission Télé Matin de France 2 sur Bureau Vallée. Un trophée immédiatement montré à tous les participants, sans en rajouter.
Quelle meilleure preuve d’être reconnu comme une marque quand la télévision vous choisit pour illustrer les bons plans de la rentrée scolaire ?
Plus que cette preuve elliptique du succès de l’enseigne, c’est le parcours de Laurence Maguarian qui invite à en savoir plus sur le fonctionnement en franchise de Bureau Vallée. Issue du secteur du paramédical, elle énonce brièvement qu’elle a intégré le réseau « par hasard » il y a 11 ans, quand il ne comptait que 17 points de vente. Aujourd’hui, Bureau Vallée, c’est 200 magasins en France, et un début de développement à l’international. Elle illustre le rêve de tous les participants à cette réunion : changer d’activité et réussir dans l’enseigne en s’inscrivant dans la durée.
De sa voix douce et rassurante, elle incite chacun à rester « discipliné et interactif », et surtout, à ne pas repartir « sans avoir obtenu de réponses pour être conforté dans un choix positif ou négatif envers Bureau Vallée ». La consigne sera respectée à la lettre.
9 heures 40 : le réseau explique son modèle économique
Les premiers slides de présentation sur l’activité et le marché de Bureau Vallée défilent. « Pour vendre moins cher, il faut coûter moins cher » : telle est le principe de base de l’enseigne. D’où pas d’emplacement numéro 1, ni de cartes de fidélité ou d’énormes catalogues sur papier, des paiements cash pour les entreprises, l’absence de remise sur des tarifs négociés au mieux à l’avance… Le concept repose sur l’alliance de prix discount et d’un accueil de qualité du client.
Très vite, les questions fusent de la part des candidats entrepreneurs : Qui sont vos clients et comment les fidéliser ? Comment s’effectue la prospection auprès du public professionnel ? Comment fonctionne votre service Achats ? Quel est votre logiciel de gestion ?
Les réponses apportées par trois interlocuteurs de l’enseigne, Laurence Maguarian, Thierry Grimonprez, directeur du développement, et Grégory, un des animateurs du réseau, sont directes : « Les franchisés qui réussissent sont ceux qui ont fait du lobbying auprès du tissu économique local ». Ou encore « Des accords n’ont parfois pas été respecté par certaines grandes marques, mais on en a tiré les conséquences ». On est loin du discours purement commercial, même si l’intention reste de séduire l’assemblée.
L’articulation du modèle économique prend forme dans la tête de candidats entrepreneurs, tous conscients que leur patrimoine personnel sert de combustible à leur aventure et qu’ils seront maîtres à bord d’une locomotive lancée sur des rails posés par l’enseigne. Sans certitude d’atteindre leur objectif.
10h30 : la concurrence, décrite sans ménagement
Maintenant que chacun a pris ses marques dans cet échange réaliste, il est temps d’aborder les questions taboues. Démarrage en douceur avec la concurrence de l’enseigne, que ce soit en termes de marché ou d’intégration de candidats entrepreneurs : que vaut-elle réellement ? Quels sont vos arguments pour l’affronter ? Pourquoi ne pas devenir patron indépendant chez la concurrence ?
Succursalistes, réseaux du commerce associé, autres enseignes de franchise : chacun en prendra pour son grade, à travers une défaillance dans leur modèle économique fortement mise en évidence. Exemple : « la grande distribution ne fait du discount qu’au moment de la rentrée, nous c’est toute l’année ! ». Pas faux. Mais est-ce vraiment nécessaire pour Bureau Vallée, aujourd’hui de loin le plus grand et le plus solide des réseaux de franchise, et qui a contribué en vingt ans au développement de 3 à 7% de son segment de marché ? Il aurait mieux valu, pour des candidats en phase de décision pour leur futur, leur donner des arguments permettant d’arbitrer entre telle ou telle alternative, notamment sur les raisons de préférer la franchise au commerce associé.
Cette discussion débouche logiquement sur la méthodologie de conquête d’un marché préconisée par l’enseigne. Là, en revanche, on apprécie la conclusion lapidaire du directeur du développement, après avoir stigmatisé l’exemple d’un franchisé Bureau Vallée qui pensait réaliser son chiffre d’affaires par l’économie sur les charges plutôt que par un mode de prospection éprouvé : « N’essayez pas d’inventer la poudre, si vous venez chez nous, faites nous confiance ! » La franchise, c’est d’abord une relation de confiance et d’estime mutuelle entre le franchisé et le franchiseur. D’où la nécessité de bien choisir le réseau avec lequel s’engager.
10h45 : l’exclusivité territoriale en question
Depuis cinq ans, fait peu commun en franchise, Bureau Vallée n’accorde plus d’exclusivité territoriale à ses franchisés. Et l’assume devant les candidats : c’est le fruit d’une mauvaise expérience précédente avec un franchisé sur l’une des plus grandes métropoles françaises, qui a bloqué le développement de l’enseigne sur cette zone durant toute la durée du contrat. Inconsciemment, un franchisé achète un territoire en même temps qu’une marque, un savoir-faire et un accompagnement permanent du franchiseur. Un candidat interroge : « Et si demain un autre franchisé Bureau Vallée s’installe à dix kilomètres de mon magasin – surtout au rythme où vous développez le réseau ! - et performe trois plus que moi ? ». « Notre réseau a tout intérêt à un maillage le plus complet et harmonieux possible », intervient Grégory. Peut-être est-ce aussi pour le franchiseur, à travers la question de l’exclusivité territoriale, une manière de replacer la confiance au cœur de sa relation avec ses franchisés.
11h10 : l’échec de franchisés au sein de Bureau Vallée enfin abordé
« C’est quoi, le taux d’échec dans le réseau ? » La question ne provoque pas de gêne profonde. Juste un léger silence. Deux cas de franchisés Bureau Vallée sont évoqués, dans l’ouest et le sud de la France. A chaque fois, le management du point de vente par l’entrepreneur apparaît comme à l’origine de la faillite du projet. « Existe-t-il des signaux d’alerte ? Intervenez-vous de façon massive ? Proposez-vous une autre zone ?», insistent plusieurs candidats entrepreneurs. Aujourd’hui, ceux-ci ont parfaitement conscience que la réussite n’est pas une ascension continue, trop souvent décrite comme fulgurante dans les médias, mais qu’elle sera au mieux émaillée de temps forts et de déceptions. Ils s’attachent au comportement du franchiseur face à la défaillance d’un franchisé, mais aussi à la prévention d’un tel cas de figure.
Pour limiter les échecs, Laurence Maguarian affirme que depuis deux ans, tout nouveau candidat est systématiquement rencontré à son domicile, en couple. Tout projet entrepreneurial doit se décider en famille. On termine cet intéressant tour d’horizon du fonctionnement du réseau par quelques chiffres concrets : un mois et demi de réflexion en général entre la remise du DIP et la signature d’un contrat de réservation de zone – soit plus que le délai légal de 20 jours -, 9 à 11 mois entre cette réservation et l’ouverture d’un magasin Bureau Vallée, et 75 jours de formation consécutifs avant de devenir franchisé.
11h45 Entrée du directeur financier du réseau
Franchisé Bureau Vallée à Auxerre et à Dammarys-les-Lys, Paul-Louis Noyret est désormais directeur financier du réseau. Il prend juste le temps de réajuster la climatisation avant de se lancer dans une longue explication, extrêmement vivante, sur la création de valeur patrimoniale - un objectif majeur pour tout entrepreneur -, à partir de trois typologies différentes de magasins de l’enseigne. La vision sur le long terme, à 4 ou 5 ans, permet toujours de mieux accepter les formidables efforts nécessaires au démarrage d’une activité.
Apport personnel, cash flow libre, exigences des banques, besoin en fonds de roulement, coût des agencements… les candidats entrent dans le vif de leur projet entrepreneurial, avec des chiffres actualisés pour une période de crise. Les questions reprennent. Comme depuis le début de la mâtinée, la moitié des candidats posent peu ou pas de questions, et ceux qui interrogent le franchiseur ont visiblement bien avancé dans leur projet.
Les réponses sont précises et dynamiques, marquées par un franc-parler. « Un magasin mal isolé, ça peut faire un ticket de 5000 euros à la fin de l’année ! », affirme par exemple Paul-Louis Noyret. Ou encore : « Pas grand-chose comme rémunération pour le dirigeant durant les deux premières années, on est dans une démarche de création de valeur ! ». On sent que l’homme a vécu ce dont il parle. On en oublie presque que l’on nage en pleine arithmétique. Les candidats restent vigilants. Une évolution de la ligne sur les charges salariales prête à discussion… Et bien, on entre dans le détail pour dissiper tout malentendu !
Paul-Louis Noyret évoque encore quelques principes de fonctionnement du franchisé comme « Quand ça va bien, fais ce qu’il te plaît. Quand ça va mal, fais comme on te dit », et il est déjà l’heure de déjeuner.
15 heures : arrivée du président-fondateur
Au retour du déjeuner, après une visite guidée d’une vingtaine de minutes dans le magasin Bureau Vallée attenant au siège, Bruno Peyroles, président-fondateur de l’enseigne, rejoint le groupe dans la pièce de réunion. Depuis dix ans, il assiste à toutes les journées d’information de son enseigne. Il demande à chacun des 14 participants de se présenter en 5 phrases, en évoquant leur passé, leur présent et leur avenir. « Je ne demande pas une déclinaison de votre CV, mais qu’est-ce qui fait que nous nous réunissons aujourd’hui. Dîtes-nous ce que vous êtes, car si ça marche entre nous, cela peut durer longtemps », affirme-t-il d’une voix reconnaissable entre toutes.
Pour laisser à chacun le temps de concevoir sa réponse, il propose de passer quelques minutes à débattre sur les questions nées de la matinée d’échanges et restées en suspens. Si les candidats n’hésitent pas à se lancer, ils adoptent un ton incontestablement plus doux pour s’adresser au franchiseur qu’à son équipe. L’un d’eux ose : « Craignez-vous la constitution d’une association de franchisés ? ». « Je cherche des contre-pouvoirs. Il faut toujours comprendre les raisons profondes de l’énervement d’un franchisé. Un réseau trop passif ou trop confiant est un écueil !», répond Bruno Peyroles.
15h15 : début de la présentation des candidats
Face à une caméra miniature, durant une heure, les 14 candidats vont, à tour de rôle, se présenter. Et dévoiler souvent une part de leur intimité. L’exercice est plaisant. Il permet à chacun de se recentrer sur l’essentiel de son parcours et finalement à tous, de déjà communier, portés vers un même but. Le dossier de candidature de chaque candidat sur ses genoux, Bruno Peyroles écoute solennellement. Demande des précisions. Apporte parfois des commentaires, notamment sur le lieu d’implantation visé et évoqué par le candidat. Impossible de déterminer, à son attitude, si le candidat a retenu ou non son attention.
16h15 : le monologue du fondateur
C’est maintenant à Bruno Peyroles de parler. Pendant près d’une heure et quart, il va décrire sa vision de l’économie française et du marché de son enseigne. Comment son concept a traversé 22 ans de crise. Comment l’histoire de son réseau s’est construite et comment l’évolution de son logo l’a traduit. Il révèle les lectures qui ont alimenté sa réflexion et l’ont aidé à forger son raisonnement.
Un monologue riche en intérêts qui se conclue, comme l’affirme Bruno Peyroles, par « la minute à retenir » de la journée : celle où sont données les valeurs de l’enseigne. Confiance et engagement. Loyauté et transparence. Ecoute et dialogue. Un grand silence dans l’assemblée suit cette minute nécessaire, comme on en a trop rarement connue depuis monsieur Cyclopède. « Chacun doit rester à sa place, mais regarder ce qu’il peut faire pour l’autre », ajoute-t-il pour exposer les rôles respectifs du franchiseur et du franchisé.
17h33 : un moment ludique pour conclure
Laurence Maguarian prend le relais du fondateur avec un petit jeu élémentaire, pour terminer sur une note plus légère, auquel tous participent de bon cœur. Après ces quelques minutes ludiques, elle demande à chacun de décider dans les 48 heures s’il désire poursuivre ou non le parcours de sélection mutuelle par un stage en immersion dans un magasin de l’enseigne. Les 14 candidats, qui seront donc tous restés jusqu’au bout, vont maintenant avoir à tour de rôle un entretien individuel avec Laurence Maguarian ou Thierry Grimonprez. Entre ceux qui attendent, avis sur les échanges avec les franchiseurs et numéros de téléphone s’échangent. Le dernier d’entre eux partira à 19 heures 30.
François Simoneschi - Rédacteur en chef La Référence Franchise / Auteur du « Guide complet de la franchise 2012 » (éditions L’Express)
La prochaine journée d’information Bureau Vallée aura lieu le 8 octobre 2012.
[1] Concept de ventes de matériel informatique, bureautique, fournitures de bureau, recyclage (encre, piles...)
[2] Amis, couple et père-fils