Du travail d’investigation pour réaliser une proposition argumentée aux nombreuses clauses à surveiller, la négociation d’un droit au bail nécessite l’accompagnement de professionnels du secteur de l’immobilier commercial.
Travail d’investigation sur le local et savoir-être avec le vendeur seront déterminants durant la négociation.
« Toute négociation repose sur un travail d’investigation afin de réaliser une proposition commerciale argumentée. On est toujours plus enclin à vendre si l’on sent que l’on a affaire à des professionnels. Ainsi, il faudra déterminer la valeur du fonds de commerce en s’appuyant notamment sur les bilans des trois dernières années de la précédente exploitation, les tableaux de valeur locative du journal L’argus de l’enseigne, et idéalement trois transactions récentes dans la même rue. D’autres éléments entrent en considération, comme savoir si le vendeur détient les murs ou on, combien il a payé son droit au bail et ce qu’il va faire après la vente, en particulier s’il part à la retraite. Le savoir-être durant la négociation est une des clés de son succès », assure Emmanuel Jury, responsable du Pôle Développement Commerce chez Progressium.
Charges, activité, cession, résolution : certaines clauses du bail sont à négocier, car elles ont un impact manifeste sur la réussite du commerce.
Dans un contrat avec un bailleur, de nombreuses clauses sont à surveiller, voire à négocier.
« En premier lieu, la clause sur les charges. Le bailleur essaie souvent de tout mettre à la charge du preneur. D’après la loi, il a notamment la responsabilité des grosses réparations – façade, toiture…-, des travaux de mise en conformité – sécurité, hygiène, amiante…-, l’assurance en cas de perte de l’immeuble, et taxes foncières. Le preneur s’occupe des charges locatives et de copropriété, de l’entretien courant et de l’assurance couvrant l’intérieur du magasin– marchandises, stock, etc. », explique Corinne De Premare, associée du cabinet d’avocats H.B & Associés.
« La clause d’activité peut détailler l’assortiment du point de vente de façon extrêmement précise, avec indivisibilité et permanence des activités en même temps comme dans l’habillement. Or, toute modification dans le contrat implique la négociation d’une indemnité de déspécialisation avec le propriétaire. Il faut essayer de négocier des baux « tous commerces », généralement « sauf nuisances », avec une sortie possible après trois années d’exploitation dans un bail « 3, 6, 9 ». D’autant que les cycles de rotation dans l’immobilier commercial se sont raccourcis à 5 ans. De la souplesse est impérative, car à force d’enserrer le commerce dans des baux de 20 pages au minimum, parfois 60 pages quand il s’agit d’un centre commercial, il en meurt ! », poursuit Gilles Hittinger-Roux, fondateur du cabinet d’avocats H.B & Associés, spécialisé dans l’immobilier.
« Il faut préserver la clause de cession, permettant au franchiseur de racheter le droit au bail sans l’agrément du bailleur », ajoute Corinne de Premare.
Tout changement en cours de contrat est généralement facturé très cher par le bailleur.
« Il faut veiller aux modalités du loyer – dépôt de garantie, prix, répartition des charges – et de la clause de résolution, pouvant entraîner la résiliation du bail pour le preneur en cas d’écarts répétés de sa part – retards ou non-paiement pour le loyer, non respect du règlement intérieur ou des clauses du bail…», indique Corinne De Premare.
« Il faut trouver sa position entre l’offre et la demande. Choisir un emplacement idéal nécessite d’accepter certains sacrifices sur le montant du loyer ou des charges, la remise en parfait état du local au terme du contrat – exigées par les foncières, ce qui a une nuance juridique avec d’importantes conséquences - ou la durée du bail. En étant vigilant, et pas fermé. Si le bailleur a besoin de garanties, il doit prendre en considération la valeur que représente la garantie d’une enseigne au concept éprouvé, qui lui assure des loyers durant plusieurs années face à un autre entrepreneur indépendant et qui offre peu de garanties ! Les impayés représentent de lourdes procédures… Dans une négociation, on peut inverser un rapport de force », relève David Borgel, dirigeant de Franchise-me Up (accompagnement des réseaux, du sourcing à la signature, en passant par expansion immobilière et financement).
François Simoneschi, rédacteur en chef de La Référence Franchise
Corinne De Premare (H.B & Associés)
« Connaître précisément la nature des engagements de chacun »
« L’avocat engage sa responsabilité sur le bail commercial. Il a une force de persuasion pour valoriser les murs auprès des bailleurs, lesquels n’ont pas forcément la volonté de conserver un patrimoine. De plus, certaines erreurs sont communément commises, telle que la non-vérification des informations sur le local transmises par le bailleur. Un avocat spécialisé dans les baux commerciaux permet de connaître précisément la nature des engagements de chacun – ce dont l’acheteur a trop souvent conscience -, et d’exiger des contreparties à certaines requêtes du vendeur. »