Toute rupture unilatérale du contrat est contraire au droit et entraîne une responsabilité juridique de celui qui la provoque. Si les possibilités de résiliation offertes au franchisé sont extrêmement limitées, il reste des cas où la négociation d’un départ peut s’engager.
Dans un contrat de franchise, toute modification ne peut être fondé que sur un échange de consentement entre franchisé et franchiseur, ce qui passe forcément par un dialogue.
« Toute rupture unilatérale du contrat est contraire au droit et entraîne une responsabilité juridique de celui qui la provoque. Il y a réparation des préjudicies causés par cette fin de partenariat prématurée en raison de conséquences financières, mais également commerciales et économiques. Le franchiseur peut ainsi réclamer des indemnités à son franchisé, ambassadeur local de la marque du réseau, au titre des pertes de représentativité sur un territoire, de clientèle attachée à l’enseigne et de capacité de la marque face à la concurrence aussi appelée « emprise territoriale », souligne Marc Lanciaux, fondateur du cabinet Lanciaux.
Si l’affaire du franchisé ne démarre pas ou périclite, la solution amiable est à privilégier à condition qu’elle soit équilibrée pour les deux parties. D’autre part, des possibillités de résiliation extrêmement limitées sont offertes au franchisé.
Si son point de vente ne démarre pas ou périclite, pour des raisons inattendues extérieures au marché ou au fonctionnement du réseau – évènements malheureux, mutation du conjoint… - ou s’il est mécontent de son chiffre d’affaires, le franchisé peut désirer une sortie prématurée du contrat de franchise.
« Le franchisé a alors tout intérêt à négocier afin de se voir proposer par son franchiseur une solution économique immédiate et certaine. Si son affaire se passe mal, il doit privilégier la démarche amiable tant que cela reste possible et à condition que la solution amiable soit équilibrée pour les deux parties. Par exemple, en proposant notamment un rachat de son fonds de commerce.
Si aucun accord n’est possible, et qu’il estime que son franchiseur est en tort, la solution contentieuse s’impose, même s’il existe toujours un certain aléa judiciaire… pour les deux belligérants. De plus, le franchisé doit veiller, une fois sorti du réseau à l’amiable, à ne pas être soumis à des obligations résiduelles trop contraignantes : obligation de non-concurrence, de non-affiliation…
Il peut subsister également des engagements financiers puisqu’il est le plus souvent caution du crédit-bailleur, de sa banque, de son bailleur… Même s’il transige en vendant sa société pour un euro symbolique, ou si son franchiseur est placé en liquidation judiciaire, il restera caution ! Il faut donc se faire conseiller dans un rapport de forces qui n’est pas égal. En général, le franchiseur a un vécu des affaires et une connaissance de la négociation plus importants.
Enfin, il ne peut obliger un franchisé à maintenir une activité déficitaire car cela est proscrit par le droit commercial. Il doit donc trouver une solution – reprise ou rupture du contrat. Cela relève de son obligation d’assistance », soutient Olivier Tiquant, avocat associé du Cabinet Thréard-Bourgeon-Méresse & Associés.
Dans tous les cas, le contrat de franchise étant généralement à durée déterminée
« Si le franchisé estime qu’il n’a pas de contrepartie aux services achetés au franchiseur, il peut soulever l’exception d’inexécution du contrat. Il devra toutefois démontrer en justice que son franchiseur n’a pas respecté ses obligations : transfert de savoir-faire, assistance permanente, renommée de l’enseigne, publicité nationale… Attention, en cas de départ anticipé du réseau, le franchisé peut devoir à son franchiseur toutes les redevances jusqu’à la fin du contrat, voire des indemnités prévues contractuellement. Dans tous les cas, le franchiseur n’a pas intérêt à conserver un franchisé mécontent dans son réseau », rappelle Hélène Helwaser, fondatrice du cabinet Helwaser.
Les possibilités de résiliation offertes au franchisé sont extrêmement limitées.
Certains contrats prévoient une possibilité de résiliation anticipée au bénéfice du franchisé en cas de faute flagrante du franchiseur.
« La clause résolutoire est toujours sous entendue dans un contrat. Néanmoins, pour la mettre en œuvre, il est indispensable d’adresser une mise en demeure officielle par lettre recommandée. Une résiliation ne peut être mise en place que si la faute est suffisamment grave pour justifier une cessation des relations », précise Monique Ben Soussen, fondatrice du cabinet Ben Soussen.
Il faut ainsi justifier d’un motif suffisamment grave pour sortir du contrat de franchise, touchant à la marque, à la délivrance de l’assistance ou à la transmission du savoir-faire, pour légitimer une résiliation de la part du franchisé.
« Le franchiseur peut perdre les droits d’usage de sa marque, s’il les a mal protégés. Il peut aussi laisser faire des actes de concurrence déloyale, comme un franchisé violant la zone d’exclusivité d’un autre avec un comportement commercial agressif. S’il n’y met pas bon ordre, il encourage cet état de fait. Le franchisé est alors en droit là aussi d’imposer une résiliation de son contrat après avoir mis son franchiseur en demeure de remédier aux désordres », remarque Olivier Tiquant.
En cas de prise de participation dans le capital de l’entreprise franchiseur, le nouvel arrivant doit une information loyale sur son parcours vis-à-vis des franchisés et respecter le contrat existant.
« Le contrat de franchise est par essence intuitu personae : la personne du franchiseur importe au franchisé, ce qui fait le cas d’une obligation dans la loi Doubin du présentation du parcours professionnel des dirigeants. S’il s’agit d’une prise de participation dans le capital de l’entreprise franchiseur, le nouvel arrivant doit une information loyale sur son parcours vis-à-vis des franchisés et respecter le contrat existant. Si l’on est dans le cas d’un rachat du réseau, avec ou sans changement d’enseigne, il faut, conformément à la loi Doubin, une relation contractuelle nouvelle. Même si la jurisprudence en la matière n’est pas encore établie », détaille Marc Lanciaux.
Dans l’hypothèse d’un rachat du réseau impliquant un changement d’enseigne, il apparaît qu’un nouveau contrat doit être signé.
« S’il y a changement d’enseigne, même pour une enseigne de meilleure notoriété, le franchisé peut invoquer un motif de résiliation du contrat et ce, même si le nouveau franchiseur affirme ne pas modifier les termes du contrat initial. En revanche, en cas de rachat de parts de la société du franchiseur, la marge de manœuvre est quasi inexistante pour le franchisé. Sauf s’il y a incapacité du nouveau franchiseur à exécuter le contrat en cours, par exemple avec une structure insuffisante pour accompagner les franchisés. Il faut, dans tous les cas, bien comprendre l’intérêt du repreneur dans l’opération de rachat », ajoute Monique Ben Soussen.
François Simoneschi, rédacteur en chef de La Référence Franchise
Hélène Helwaser (cabinet Helwaser)
« Si l’intérêt commun des deux parties est maintenu, il n’y a pas de raison objective de départ pour le franchisé. »
« Le franchisé peut avoir conclu une relation intuitu personae avec les dirigeants du réseau, c’est-à-dire avec la personne du franchiseur. Or, selon la jurisprudence, l’intuitu personae prévaut dans le contrat de franchise. Cela a pour conséquence que dans les cas de fusion ou d’apport d’actif, les Tribunaux considèrent que l’accord du franchisé est nécessaire pour le maintien des relations contractuelles.
Cette jurisprudence est critiquable car le franchisé ne contracte pas, en considération de la personne physique ou morale du franchiseur, mais en fonction du concept et de la réussite du réseau.
Néanmoins, il faut toujours privilégier le dialogue et ne pas imposer. Le franchiseur a tout intérêt à convaincre sans contraindre. Si l’intérêt commun des deux parties est maintenu, il n’y a pas de raison objective de départ pour le franchisé. »